8/28/2008

TUINA, le massage du Yin et du Yang

Par Jean Robert


Véritable trésors de la médecine traditionnelle chinoise, le massage Tuina n’en est pas moins une technique thérapeutique facilement accessible aux non-spécialistes.


Contrairement aux autres méthodes thérapeutiques de la médecine chinoise, le massage Tuina ne demande pas un pré-requis conséquent pour être rapidement utilisable et très efficace. Et on pourrait même affirmer qu’il ne peut s’apprendre que par la pratique et donc grâce au travail sur un patient. Ici, et comme dans tout travail manuel, la connaissance ne peut provenir que de la répétition. L’art du massage Tuina est donc avant tout issu d’une expérience et le masseur chinois est un artiste qui doit l’essentiel de sa réputation à l’intelligence de ses mains.

La grande dialectique du Yin et du Yang

Toute la pensée de l’Empire du Centre peut être résumée en deux termes bien connus : Yin et Yang. Ces deux modalités, d’une seule et unique même énergie fondamentale, le Qi, sont en effet omniprésentes dans la tradition chinoise. Nous le savons, le Yin et le Yang représentent les deux forces opposées qui réagissent au sein même de la manifestation, lui permettant ainsi de se maintenir grâce à un renouvellement permanent. Lumière et ombre, dur et mou, feu et eau, ciel et terre, comptent parmi les principaux symboles de ces deux polarités. Au fond, pour un Chinois, la Vie c’est toujours et nécessairement du Yin et du Yang. C’est pour cette raison que leur opposition est aussi une complémentarité. Ces deux modalités énergétiques sont bien présentes dans le massage Tuina. Les techniques manuelles du Tuina, sont très nombreuses. Chaque geste y est décomposé avec une extrême précision, qui fait que d’une méthode à l’autre les différences sont parfois des plus subtiles. En outre, comme la même technique peut souvent s’employer avec diverses parties de la main ou du bras, d’infinies variantes découlent de chacune d’entre elles.

Cependant parmi les multiples méthodes du Tuina, quelques unes seulement font parties de « la trousse d’urgence du masseur ». Le terme même de Tuina, nous en désigne d’ailleurs deux capitales : Tui, qui est l’action de « Pousser » et Na qui est celle de « Saisir ». Prendre et repousser, voilà déjà bien tout un programme.

Ces deux termes n’ont évidemment pas été choisis au hasard parmi les multiples méthodes gestuelles du massage thérapeutique pour le représenter. Il s’agit en effet là aussi de deux actions opposées mais complémentaires qui nous replongent tout de suite dans la grande dialectique du Yin et du Yang, merveilleusement symbolisée par le célèbre diagramme du Taiji.

« Saisir » représente ici la polarité Yin, il s’agit en effet d’un geste de préhension qui ramène l’énergie vers soi. Au contraire, « Pousser » est une méthode d’expulsion, de rejet vers l’extérieur, c’est donc une forme Yang.

Employées avec alternance, ces deux techniques vont mobiliser le Qi interne du patient afin de « ré-animer » la circulation énergétique dans les méridiens. Par la Saisie, l’énergie bloquée à l’interne est extraite et ramenée à la superficie ; par la Poussée elle est dégagée et propulsée dans la grande circulation. La répétition de ces mouvements est réputée pour dissoudre les stases, désobstruer les méridiens, calmer les douleurs et détendre en profondeur les tissus. Bien entendu un certain nombre de paramètres (comme la vitesse, la force, la profondeur, la direction du geste ainsi que les parties corporelles utilisées pour pratiquer) vont permettrent au praticien de moduler son traitement en fonction des caractéristiques physiques et énergétiques de son patient et de la localisation de la pathologie. Mais l’harmonie énergétique, qui est toujours l’objectif final en médecine chinoise, résultera finalement toujours du juste équilibre entre les deux forces opposées et complémentaires Yin et Yang.

Un autre exemple de cette nécessaire complémentarité des oppositions, va nous être donné par l’appellation générique du massage en chinois, Anmo. Alors que Tuina représente l’aspect plus spécifiquement thérapeutique du massage, le terme d’Anmo désigne globalement le massage traditionnel. An, c’est « Presser » et Mo, c’est « Frotter ». Encore une fois nous nous trouvons donc confronté à nos deux polarités. En effet, pour Presser il faut appuyer et donc pénétrer à l’interne, il s’agit en conséquence d’une technique Yin. Au contraire Mo nous montre une action Yang car elle se passe en superficie, c’est une sorte de caresse « épidermique » qui ne concerne que le niveau superficiel de l’individu. Mais là encore, les actions se complètent et s’épousent à merveille. An permet de stimuler la profondeur et Mo de dégager la surface. Nous constatons ainsi que pour dire « massage », les chinois ne font finalement que répéter « Yin et Yang » en se servant simplement de divers termes techniques. Ils nous rappellent ainsi sans arrêt, que dans l’existence tout participe nécessairement de ces deux énergies fondatrices.

Gunfa, la technique du roulement

Les quatre caractères qui désignent l’art du massage, Tuina Anmo, nous ont déjà montré quatre gestes fondamentaux : Pousser, Saisir, Presser et Frotter. Ce sont bien en effet les méthodes de base du massage énergétique. Cependant le geste qui est vraiment le plus spécifique du Tuina et qui caractérise le mieux, c’est le Gunfa. Gun signifie « Rouler » et Fa « Technique ». Il s’agit ici d’une technique de rotation bien particulière et très caractéristique, véritablement unique et sans égale dans aucune autre méthode de massage traditionnel. C’est même par son Gunfa que l’on discerne vraiment la qualité du masseur. Il existe deux techniques principales du Gunfa. La première Zhi Gunfa, le roulement vertical, est un mouvement qui est centré sur les articulations métacarpo-phalangiennes de la main.

La deuxième, Xie Gunfa, le roulement oblique, s’effectue elle, par rotation sur les deux derniers métacarpiens. Cependant, dans les deux cas, il s’agit d’un roulement alterné de gauche à droite à amplitude, vitesse et pression très codifiées, qui varient en fonction de la variante utilisée ainsi que de la localisation du travail et bien sûr de la constitution du patient.

Pour celui qui ne fait que regarder travailler le masseur chinois, l’exercice semble relativement aisé. Vue de l’extérieur le geste paraît souple et relâché, facile et de forme Yin donc... cependant pour celui qui « reçoit » le massage, il en va tout autrement. En effet, vécu de l’intérieur, le Gunfa s’avère vraiment très tonique et de modalité incontestablement Yang. Souvent d’ailleurs, les patients inexpérimentés demande ingénument avec quel outil le praticien leur pétrir ainsi le corps !!! A expérimenter !



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